Allemagne : pourquoi les chats doivent-ils être confinés pendant 3 mois?
Les propriétaires de chats de la ville allemande de Walldorf ont reçu l'ordre à la mi-mai de garder leurs animaux à l'intérieur jusqu'à la fin du mois d'août afin de protéger un oiseau rare pendant sa période de reproduction.
L'arrêté vise à contribuer à la sauvegarde de l'alouette huppée, qui fait son nid au sol et constitue donc une proie facile pour les chasseurs félins.
La population de cet oiseau en Europe occidentale a fortement diminué au cours des dernières décennies. Bien qu'elle soit classée parmi les espèces les "moins préoccupantes" en Europe par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
"La survie de l'espèce dépend - entre autre - de chaque poussin", ont déclaré les autorités de Walldorf.
La règle s'applique à tous les chats de la partie sud de la ville et sera répétée pendant les trois prochaines années, d'avril à août.
Les propriétaires risquent une amende de 500 euros si leur chat est trouvé errant à l'extérieur et pourraient se voir infliger une amende allant jusqu'à 50 000 euros si leur animal blesse ou tue une alouette huppée.
Dois-je garder mon chat à l'intérieur ?
Si vous habitez à Walldorf, la décision n'est plus entre vos mains. Mais pour ceux qui habitent ailleurs, la réponse n'est peut-être pas aussi tranchée.
"Empêcher soudainement les chats qui sont habitués à sortir de le faire, signifie des restrictions et un stress immenses pour les animaux", a déclaré la Deutscher Tierschutzbund, la plus grande organisation allemande de protection des animaux, dans une déclaration à Euronews Green.
"L'influence négative des chats sur la population des oiseaux chanteurs est en tout cas controversée et, à notre connaissance, n'a pas encore été prouvée pour l'alouette huppée à Walldorf."
L'organisation soutient les mesures de protection de l'alouette huppée mais estime qu'aucun animal ne peut être traité comme un animal de seconde zone.
"Définir les chats domestiques comme les 'coupables' de la mise en danger de certaines espèces d'oiseaux, c'est aussi leur faire porter le chapeau du fait que les humains ont détruit les habitats et les sources de nourriture des espèces sauvages sur une longue période, menaçant ainsi leur existence", conclut la déclaration de l'association.
Ce sentiment est partagé par Daniela Schneider, une militante de Four Paws Allemagne.
"L'influence de l'intensification de l'agriculture, des monocultures, de la mortalité des insectes et de l'augmentation de l'aménagement du territoire est probablement plus importante que celle de certains chats qui chassent les oiseaux", explique-t-elle à Euronews Green.
"Ces causes sont provoquées par les humains. Il vaudrait mieux lutter contre ces dernières plutôt que d'accuser les chats de cette situation."
Les chats sont-ils un danger pour la faune sauvage ?
L'industrie européenne des aliments pour animaux de compagnie a constaté que 26 % de tous les ménages européens possèdent au moins un chat. Cela conduit inévitablement à ce qu'un quart de la population ait des sentiments forts sur cette question de priver les chats domestiques de leurs déplacements.
Une étude réalisée en 2013 a estimé que les chats domestiques en liberté aux États-Unis tuent environ 2,4 milliards d'oiseaux et 12,3 milliards de mammifères par an. Les auteurs ont toutefois reconnu que les chats non propriétaires sont à l'origine de la majorité de cette mortalité.
Les chiffres les plus récents de la Mammal Society indiquent qu'au Royaume-Uni, les chats capturent jusqu'à 100 millions d'animaux au printemps et en été, dont 27 millions d'oiseaux. Selon eux, les espèces d'oiseaux les plus fréquemment capturées sont les moineaux domestiques, les mésanges bleues, les merles et les étourneaux.
Malgré ces statistiques, la plus grande organisation caritative britannique de protection de la nature, la RSPB, affirme qu'il n'existe aucune preuve scientifique claire que cela entraîne un déclin des populations d'oiseaux.
"Plusieurs millions d'oiseaux meurent naturellement chaque année, principalement de faim, de maladie ou d'autres formes de prédation", déclarent-ils sur leur site web.
"Il est probable que la plupart des oiseaux tués par les chats seraient de toute façon morts d'autres causes avant la prochaine saison de reproduction, il est donc peu probable que les chats aient un impact majeur sur les populations."
À Walldorf, le journal régional Rhein-Neckar-Zeitung a rapporté mercredi que le responsable de l'association locale de protection des animaux envisageait de prendre des mesures juridiques pour contester l'arrêté "disproportionné".
Les propriétaires de chats concernés par le nouvel arrêté peuvent exercer leur droit d'opposition jusqu'à la mi-juin.